Je m’appelle Laumie et j’ai 23 ans. Il y a 8 ans, je suis devenue anorexique.
Définition de l’anorexie : Du point de vue strictement médical, l'anorexie est un symptôme qui correspond à une perte de l'appétit. Ce symptôme peut s'observer dans de très nombreuses maladies organiques et psychiatriques. Quelle qu'en soit la cause, il peut conduire à la malnutrition et à ses complications. Quand on dit « anorexie », on a souvent l’image d’une jeune fille ultra maigre parce qu’elle se considère trop grosse, suite à des remarques taquines sur les formes qu’on prend à l’adolescence, ou suite aux modèles féminins des magasines.
Pour comprendre comment la maladie se déclare, il faut savoir que l’anorexie ce n’est pas qu’une maigreur poussée à l’extrême. Il faut savoir que dans la plupart des cas, il s’agit d’un appel au secours. On ne sait plus quoi faire ni comment réagir face à une situation, alors on prend la seule solution qu’on ait sous la main : on refuse de se nourrir ou bien alors on mange beaucoup, voire même trop, et après le repas, on va vomir, dans le cas de la boulimie.
Je peux d’ores et déjà vous dire qu’à cette époque-là, je me moquais pas mal de mon apparence. Le petit truc qui m’a fait basculer, c’est les brimades de mon Prof de Sport et les sempiternelles et méchantes moqueries de mes camarades de classe, que je connaissais pour la plupart depuis l’enfance.
N’ayant jamais été très sportive, je préférais consacrer mes loisirs à lire et écouter de la musique plutôt que pratiquer un sport en club comme tous ceux de mon âge. Ce qui ne leur plaisait pas, et ils me l’ont bien fait sentir… En sport à l’école, c’était pire : 2h de supplice par semaine … Le prix à payer quand on a un médecin qui ne délivre pas de dispense sauf cas sérieux. Je l’ai déjà dit et je le répète, je n’aimais pas le sport. Ma Prof de 6° et 5° n’ayant rien fait pour arranger ce fait, je ne faisais pas le moindre effort pour courir après un ballon ou shooter dedans. Quand à la gym, sachant que l’équilibre et moi étions très peu amis à ce moment-là, je prenais toujours le niveau le plus facile, afin de ne pas me compliquer la vie. Mon Prof de 4° a entrepris de se moquer de moi à chaque fois que je tentais de faire un effort, réduisant à néant mon envie de me faire mieux voir de mes camarades qui m’enfonçaient chaque jour un peu plus. Alors, comme j’en avais marre et que je n’arrivais pas à en parler à ma mère (qui pourtant était présente à chaque fois que je rentrais de cours et que je m’effondrais en pleurs parce qu’on m’avait encore tyrannisée), j’ai refusé de m’alimenter. Involontairement, je me suis mise à perdre l’appétit, à ne plus vouloir manger les petits plats maison, déchaînant ainsi les hurlements de rage de mon père, désemparé face à une telle situation. Je n’ai jamais eu un très gros appétit, donc mes parents ne se sont pas vraiment inquiétés sur le moment. Mon médecin de famille commençait à avoir de l’âge, et pensant qu’il s’agissait d’un manque de vitamines, me bourrait de petites pilules pour me faire manger.
Mes professeurs ont vu mes résultats baisser, alors que j’étais pourtant une bonne élève jusque là. Ils ne se sont cependant pas inquiétés, et à la fin de l’année scolaire m’ont fait redoublée. J’avoue avec le recul qu’ils ont fait le bon choix. Je n’aurais sans doute pas retrouvé le semblant d’équilibre que j’ai eu avec ma nouvelle classe, si j’avais refusé le redoublement. De toute façon, je n’avais pas ma place parmi mon ancienne classe. Même si je ne voulais pas l’admettre, je sentais confusément que j’aurais dû naître l’année d’après … J’ai vécu deux ans à peu près normaux, refusant cependant de me réalimenter. Un blocage s’était produit et j’avais perdu confiance en moi. Entre temps, mon médecin de famille avait cédé son cabinet à une nouvelle venue. Laquelle a tout de suite compris à quoi elle avait affaire et m’a surveillée de près, ne voulant pas me retrouver à l’Hôpital. Tout allait bien jusqu’à ce que je passe en Seconde au Lycée de Borda. Etant la seule de ma classe à continuer en Latin, je me suis retrouvée sans personne de connu dans ma classe. Et même si je passais mes récrés avec mes anciens amis, rien n’était plus comme avant. La nourriture à Borda est mauvaise. Ma meilleure amie m’avait avertie, mais je pensais qu’elle exagérait. Or, j’ai pu constater que non seulement ça n’était que trop vrai, mais que certains jours, c’était encore pire que tout ce que j’avais pu imaginer. Cela n’a bien évidemment pas arrangé mon problème d’alimentation qui a empiré …
Désemparée par la taille du Lycée (Il faut savoir que ce Lycée accueille entre 2000 et 2500 élèves par an. Pour une petite ville comme Dax, c’est un très grand Lycée) et par ma nouvelle solitude, j’ai à nouveau redoublé, ne perdant pas de vue que je voulais faire une 1°L. J’ai donc pris option Italien. Une mauvaise nouvelle en entraînant une autre, lorsqu’on m’annonce le redoublement de ma 1° Seconde, je viens d’apprendre que Maman est atteinte d’un Cancer du Sein. Mon seul soutien n’étant pas apte à protester, et Papa se sentant beaucoup trop inférieur aux Profs, je suis obligée d’accepter.
A la rentrée, surprise, 3 Rionnaises sont dans ma classe. Ce ne sont pas des filles que j’apprécie particulièrement, et elles me le rendent bien. Même si l’ambiance est sympa, je suis encore mise à l’écart. Trop de timidité, de pudeur me tienne en retrait des autres. Jusqu’à la moitié de l’année, tout ne se passe pourtant pas trop mal. Les Profs sont sympas, mis à part celle de Français qui fait une fixation sur les Commentaires Composés, chose que j’ai pris en horreur dès ma première Seconde. Ne comprenant pas que j’ai l’habitude d’appeler un chat un chat, elle me sous note mes devoirs et ma moyenne s’en ressent. Un malheureux accident se produit alors que je m’accroche de mon mieux pour avoir mon passage en 1°L. Ma Prof d’Italien vient de se casser la jambe, et nous ne la reverrons donc pas avant un long moment. La remplaçante ne m’apprécie pas. Est-ce parce que je suis déjà allée 2 fois en Italie et elle non ?? Est-ce parce que j’ai une bonne culture générale à force de passer tout mon temps libre le nez plongé dans les bouquins ?? Je n’en sais rien. Toujours est-il que mes notes se mettent là aussi à dégringoler. La fin de l’année entraîne une nouvelle fois un redoublement … Sauf que là, je suis réorientée en BEP Secrétariat. Pour moi, c’est la fin d’un rêve. Je sais qu’en passant par un BEP, je ne retrouverai plus jamais la filière littéraire et mon désir d’être Guide Touristique s’envole en fumée …
Je dois donc supporter une 3° pré-rentrée pour les Secondes … Les premières minutes avec mes nouvelles camarades (car il n’y a qu’un seul garçon) ne sont pas pour me rassurer sur l’entente … Toutes se connaissent plus ou moins et me font bien sentir que je suis en trop. Sauf que là, je ne me laisse pas faire. Chaque jour qui passe, mes liens avec une fille qui est rejetée tout comme moi, se resserrent. Ce n’est pourtant pas elle qui me fait reprendre goût à la vie. Même si je suis très amie avec elle pendant 3 ans, je sais reconnaître qu’elle ne m’est pas d’un grand secours, ni même d’un grand réconfort face à ce que je vis. Cette amitié s’achèvera d’un seul coup de toute manière, vu qu’elle n’a pas la même façon que moi de réagir face à certaines situations.
Mon BEP terminé, je suis toujours anorexique, mais je vais mieux parce qu’au fond de moi, je commence à me faire à l’idée que les gens seront toujours des crétins face à la différence. Je rentre alors en 1°STG à St Jacques de Compostelle, plus connu sous l’ancien nom de Cendrillon. Pour moi, n’y étant jamais allé, c’est le Lycée pour les gosses de riches, et je ne pense pas y être à ma place. J’ai donc un fort à priori quand je pénètre dans la cour. Je me trompe pourtant, car en arrivant devant ma classe, je constate qu’il y a des exceptions. Le groupe de filles qui ricanent a l’air tout ce qu’il y a de plus normal, la petite brune aux tâches de rousseur n’a pas l’air mal non plus … Bref, les ¾ de ma classe sont des gens tout ce qu’il y a de plus simple. Si certains ont des moyens financiers supérieurs à la norme, ils n’en font pas étalage en tout cas, à mon grand soulagement.
Durant mes premiers jours de cours, je me lie d’amitié avec 3 filles : Laura, ma voisine de table ; Marjorie, la petite brune aux tâches de rousseur et qui habite dans un village pas loin de chez moi ; et Lucie, la petite brune qui était d’abord avec les filles qui ricanaient le jour de la Rentrée. C’est le début d’une longue amitié qui dure encore avec 2 d’entre elles. Et grâce à elles, je réapprends à aimer les repas, à avoir faim … En gros, je reprends goût à la vie et cela se ressent dans mon poids puisque je me remets à grossir, à ma grande joie et au grand soulagement de tous ceux qui me connaissent.
Laura nous fait rencontrer son copain, Nico, et des amis à lui, Jérémy, Florian et Ludovic. C’est le coup de foudre pour Lucie et Jérémy. Mijo ne peut jamais venir aux soirées, mais nous pensons à elle en lui téléphonant. Je rencontre Mathieu l’année d’après, toujours grâce à Laura et Nico. On passera 9 très bons mois ensemble, mais tout a une fin. Mathieu et moi nous séparons en bons termes, et je coupe les ponts avec Laura et Nico en leur disant leurs 4 vérités.
Entre temps, je suis réorientée en 1° BAC Pro Commerce, au Lycée de St Vincent de Paul. Ce lycée là a la réputation d’être un berceau de cas soc’ comme on dit. J’ai appris qu’il faut se méfier des rumeurs, alors quand j’arrive dans ce Lycée, je ne suis préparée en rien à ce qui va m'arriver.
Je fais la connaissance d’Aurélie et Noëlle, 2 filles tout ce qu’il y a de plus sympa. Ce sont elles qui ont pris la relève désormais, mais je n’en oublie pas pour autant toutes les personnes formidables qu’il y a autour de moi et qui m’ont soutenue tout au long de mon combat.
Alors je voudrais ce 24 Mai 2008, passer un message à toutes les personnes souffrant de troubles alimentaires. Que ça soit Anorexie ou Boulimie, c’est le même combat. Alors accrochez-vous à vos rêves, et ne lâchez rien. Je réalise que j'ai eu énormément de chance d'être aussi entourée, et je sais que c'est dur, qu'y a des moment où on ne demande qu'à se laisser glisser vers l'abîme. Il faut penser à tous ceux qu'il y a autour de vous, qui souffrent de leur impuissance face à votre douleur silencieuse. Alors courage.
Et pour finir, je vais remercier tous ceux qui font ou ont fait de ma vie ce qu’elle est maintenant.
REMERCIEMENTS :A Flora : Même si on ne se connait que depuis peu de temps, j’apprends chaque jour à t’apprécier davantage. T’es une fille géniale, alors reste comme t’es, et sache que si t’as le moindre soucy, j’suis là.
A Fred : C’est vrai que ça fait pas longtemps qu’on se connait, mais je t’aime beaucoup, et franchement, t’es génial comme garçon. Si un jour ça te tente de descendre glandouiller dans les Landes, tu connais mon numéro, alors hésite pas
A Justine et Antonin : Justine, depuis que je te connais, je ne regrette pas que Laura t’ait croisée ce jour-là. Et To, merci pour tes délires. Soyez heureux tous les deux, j’vous souhaite que du bonheur.
A Pad : T’es le meilleur beau gosse (XD). Sérieusement, je suis super contente de te connaître, et j’espère qu’un jour notre amitié se concrétisera par une rencontre.
A tous ceux d’SOS J’Me Fais Chier : Vous êtes merveilleux. Love you <3